Inclusion numérique: où en sommes-nous en Europe ?
Les inégalités numériques, qui se réfèrent plus souvent à un phénomène de “fracture numérique”, constituent un obstacle pour celles et ceux qui ont, d’ores et déjà, des difficultés à les utiliser ou qui n’y ont pas accès. Pour combler ces lacunes, les pouvoirs publics agissent à la fois au niveau national et européen, en lien avec les autorités locales. A titre d’exemple, la directive européenne 2018/1972 vient créer la notion de « service d’accès adéquat à l’Internet à haut débit » et donne des critères de définition plus rigides sur la définition d’une connexion Internet. Cette directive vient ensuite être retranscrite dans les droits nationaux des Etats membres, notamment à travers des plans d’action ou un outil équivalent.
Voici des exemples venant de quatre pays de l’Union.
Vue globale du kit d'inclusion numérique lancé par le gouvernement français
Source: Mission société numérique (screenshot)
En France, un plan national pour un numérique inclusif
L’Etat souhaite détecter les publics en difficulté pour diagnostiquer leurs lacunes en termes numériques. Cela se fait en soutenant le MOOC proposé par la MedNum et le CNFPT “sur les enjeux et bonnes pratiques de la médiation numérique au service de la transition numérique des territoires à destination des agents des collectivités territoriales”.
Les jeunes du service civique sont aussi ciblés, puisque la Ligue de l’Enseignement sera mobilisée pour garantir la qualité des interventions de ces jeunes volontaires. Le but est de sensibiliser au numérique les publics ciblés, et aussi à outiller ces jeunes volontaires.
L’agenda numérique pour l’Espagne et ses quatre objectifs pivots
Accessibilité, alphabétisation, égalité, employabilité. Ce sont les quatre points sur lesquels l’Espagne a décidé d’axer son agenda sur le numérique.
Tout d’abord, ce plan vise à gommer les zones grises du royaume. Ensuite, les plus âgés et les moins qualifiés sont aussi visés dans cette montée en compétences prévue par l’Etat. Par ailleurs, le gouvernement espagnol cherche à combler les différences entre hommes et femmes quant à l’accès au numérique. Enfin, la formation continue est visée, puisque l’Etat cherche à développer les compétences numériques de chacune et chacun au cours de leur vie professionnelle.
Pour réaliser ces objectifs, l’Espagne a pour ambition de garantir un accès Internet à toute sa population et à un débit d’au moins 100Mb/s. Des investissements colossaux à hauteur de 140 millions d’euros seront donc mis en place pour pouvoir faire ce constat d’ici 2025.
Deux femmes occupées sur un ordinateur
Source: Gobierno de España
Le Palais de la Nation, qui accueille le Parlement fédéral belge
Source: Wikipedia, Palace of the Nation in Brussels
Une Digital Belgium pour combler un fossé numérique
Les autorités belges ont souligné la fracture numérique qui touche surtout certaines tranches d’âge, les personnes les moins diplômées et celles aux revenus les plus modestes. Ces trois degrés de fracture numérique sont à éliminer par plusieurs moyens. Par exemple, l’idée est de renforcer la coopération entre les régions, les communes et l’Etat, tout en impliquant tous les acteurs pour créer une véritable e-inclusion, y compris dans les services publics.
En effet, 10% des ménages belges n’ont toujours pas accès à Internet. L’objectif est donc de garantir l’accès à Internet haut-débit pour toutes et tous, notamment dans les communes rurales de Wallonie.
La stratégie adoptée par la Belgique est aussi de permettre au plus grand nombre d’accéder aux services numériques, que ce soit en rendant les prix du matériel informatique et des abonnements accessibles. En parallèle, le gouvernement souhaite donner la possibilité à chacune et à chacun de monter en compétences, tout en mettant en place des campagnes de sensibilisation visant à souligner les bonnes pratiques. Néanmoins, depuis l’élaboration de ce plan Digital Belgium, le gouvernement fédéral a indiqué vouloir le renforcer rapidement.
Au Portugal, un plan d’action pour la transition numérique
“L'autonomisation numérique des personnes, la transformation numérique des entreprises et la numérisation de l'État” sont au cœur de ce plan lancé en mars 2020 et validé en Conseil des ministres. Dans le cas présent, les différentes stratégies déjà mises en place ou élaborées au Portugal, au niveau local ou national, ont été mises en commun pour créer une véritable synergie nationale. Ainsi, ce plan vise à jongler entre différentes politiques sectorielles pour arriver à une transition numérique effective et inclusive.
A noter l’inspiration estonienne dans ce plan portugais. Un programme de e-Résidence permettra aux résidents portugais établis à l’étranger d’utiliser une version en ligne des services publics. Le pays des Oeillets souhaite, en parallèle à cette mesure, créer un accès en ligne complet aux 25 services publics les plus utilisés.
A travers des approches différentes, les résultats escomptés semblent être les mêmes dans ces différents pays: celui de combler le fossé numérique qui existe dans nos sociétés. Il concerne les publics les plus âgés, les plus modestes et ceux vivant dans des zones rurales. Ces trois groupes constituent la clé de voûte de l’action des pouvoirs publics en la matière, puisqu’ils sont les plus à même d’être en précarité numérique. Entre objectifs ambitieux et fracture numérique aussi grande soit elle, les autorités nationales et locales auront fort à faire pour garantir un accès Internet à chacune et à chacun.
Sources:
– Agence nationale de la cohésion des territoires, Plan national pour un numérique inclusif, 2018
– Conseil central de l’Économie / Centrale Raad voor het Bedrijfsleven, Vers une politique d’inclusion numérique en Belgique, 2020
– Ministro da Economia e Transição Digital, Portugal Digital, 2020
– ePortugal, Governo lança plano de ação para a transição digital, 2020
– Ministerio de asuntos económicos y transformación digital, Plan de inclusión digital y empleabilidad, 2014